13 Mai 2019;
« 1 balle 2 prises, ça sent la soupe chaude pour le numéro 18, première présence au bâton de la saison et déjà il tire de l’arrière… Le lancer… La balle est frappée en flèche… Tout juste hors ligne du côté du troisième but. »
« Sans doute une situation qui lui déplaît, il était en avance sur ce lancer. »
« Ça, c’est sûr, avec sa fin de saison abrupte l’an passé, il va vouloir faire bonne impression pour le premier match de la saison. »
« Oh ça… »
« Il se place, le lanceur est prêt, le fait attendre un peu… 1 balle deux prises toujours.. Le lancer… La balle est frappée mollement vers le troisième but, le numéro 18 en pleine accélération, il ne se laissera pas retirer si facilement, le joueur de troisième but récupère la balle, jongle un peu, OH il a une chance!!! Le relais au premier… Il est SAUF!!! »
« Toute une course qu’on vient de voir là!! »
« Oui et il semblerait que son genou ait tenu le coup. »
« Oui, voilà quelque chose qui va le rassurer. »
« Le prochain frappeur s’avance. Le numéro 33. Le 18 est prêt à courir, aucun retrait. »
« Le lancer. Il frappe un haut ballon à l’avant-champ. Le 18 reste sur son but, et l’arrêt-court capte la balle…
Premier retrait. »
« Au tour du 20 de s’amener. Se place au marbre. Le lanceur se prépare. »
« Le lancer, LA BALLE EST FRAPPÉE EN FLÈCHE VERS LE TROISIÈME, départ en trombe du numéro 18! Le joueur de troisième plonge et capte la balle, QUEL VOL!!! »
« OH cette balle était frappée avec force »
« Se relève et lance un boulet au premier but pour le double jeu. Le numéro 18 est couché par terre… As-tu vu le jeu? »
« Oui, bon, lorsque le 3e but a attrapé la balle, Greco a freiné brusquement sa course pour retourner vers le premier but, je ne sais pas si j’ai bien vu, mais son genou droit n’a pas bien encaissé le choc, sa jambe semble s’être pliée sur le côté »
« Il se tord de douleur au sol, il essaye de se relever, mais il aura de toute évidence besoin de l’aide de ses coéquipiers »
« Oh il n’a pas l’air content… De mauvais souvenirs sans doute… Son ligament collatéral. »
« On dirait bien, peut-être même le ménisque, il semble avoir de la difficulté à plier sa jambe. »
« Ohhh ça sent la fin mon Roger… Ça sent la fin… »
« Ça sent la fin… »
« Ça sent la fin… »
« … la fin… »
C’était le 13 mai 2019, premier match de la saison, et s’il y avait eu une description, c’est ce à quoi elle aurait ressemblé… Une présence au bâton, un simple, sur un cafouillage du gars au troisième but, j’aurais dû être retiré… Peut-être ma saison aurait-elle été sauvée… Mais bon, avec des peut-être, ou des Si, on ne sait rien. Et pourtant, le temps d’un instant, une fraction de seconde, mon cerveau a décidé de m’envoyer comme information que la balle allait passer, la réalité en est toute autre.
Résumé d’un été sans point ni coups sûrs; après avoir assisté à deux matchs, comme spectateur j’ai cessé d’y aller. Frustré, frustré d’être cloué au banc, frustré de ce genou qui ne guérit pas, frustré de cette douleur insupportable qui ressurgit dès que je fais un mouvement brusque, qu’une résistance latérale exerce une pression sur mon genou. Puis la prise de conscience d’une mauvaise attitude. J’aurais dû assister à chaque match auquel je pouvais. Pas par torture, non, par solidarité d’un groupe qui a travaillé fort, match après match, avec des situations difficiles, parfois, avec des équipes incomplètes, souvent. Un beau groupe auquel je ne peux que rendre hommage. Un groupe de joueurs qui s’est levé, après une saison difficile, sans victoire, se relever et remporter des matchs avec brio, jouer en équipe, se parler sur le terrain, s’encourager, se motiver. Et moi… J’étais absent, frustré de ne pouvoir physiquement participer à la victoire, fâché d’abandonner mes coéquipiers dans la défaite. J’ai choisi la fuite…
Ce sera mon quatrième été sans jouer à la balle.
Quatre étés sans point ni coups sûrs.
Quatre étés à fuir un sport que j’adore.
Quatre étés à me fuir moi-même.
Parce qu’au fond, un été sans point ni coups sûrs, ce n’est pas un été où on a été le meilleur lanceur de tous les temps…
C’était le 13 mai 2019, et entre le premier et le deuxième but, c’était la fin de ma saison.
Un été sans point ni coups sûrs, c’est un été teinté d’abandon, c’est quatre étés à se chercher, sans vraiment vouloir trouver de solutions.